Publié le 11 mars 2024

La viabilité des transports collectifs québécois ne se jouera pas sur les subventions, mais sur leur capacité à pivoter vers un modèle financé par la valeur collective qu’ils génèrent pour la société.

  • La diversification des revenus, notamment via la captation de la plus-value foncière, est un levier structurel sous-exploité mais désormais légalement encadré.
  • La simplification radicale de l’expérience usager, du paiement à la planification des trajets (MaaS), est la condition sine qua non pour concurrencer l’automobile.

Recommandation : Auditez votre réseau non plus sur sa rentabilité directe par usager, mais sur son impact économique, social et environnemental global pour justifier et orienter les investissements futurs.

La vision d’un autobus ou d’une rame de métro circulant à moitié vide est devenue une image familière et angoissante pour tout gestionnaire de réseau de transport collectif au Québec. La pandémie a laissé des cicatrices profondes, non seulement sur l’achalandage, mais surtout sur le modèle économique qui soutenait l’ensemble du système. Face à des déficits qui se creusent, la réaction instinctive est souvent de se tourner vers les solutions éprouvées : solliciter une aide gouvernementale accrue ou envisager des hausses tarifaires, des options de plus en plus difficiles à défendre politiquement et socialement.

Ces approches, bien que nécessaires à court terme, ne sont que des pansements sur une hémorragie structurelle. Elles ne répondent pas au changement de paradigme imposé par la démocratisation du télétravail et les nouvelles aspirations citoyennes en matière de mobilité. Mais si la véritable clé n’était pas de combler un déficit, mais de repenser fondamentalement la manière dont la valeur du transport collectif est calculée et financée ? Et si le modèle basé quasi exclusivement sur le billet vendu par l’usager était devenu obsolète ?

Cet article propose une perspective différente, destinée aux décideurs. Il s’agit de passer d’un modèle de financement réactif, basé sur l’usager, à un modèle proactif, financé par la valeur collective générée. Nous analyserons comment des leviers comme la captation foncière, la simplification tarifaire radicale et l’intégration servicielle (MaaS) ne sont plus des options futuristes, mais des nécessités stratégiques pour assurer la survie et le développement de vos réseaux.

Ce guide explore les stratégies concrètes et les arbitrages politiques nécessaires pour naviguer dans cette nouvelle ère. Vous y trouverez des analyses et des pistes d’action pour transformer la crise actuelle en une opportunité de bâtir un système de transport collectif plus résilient, pertinent et financièrement soutenable pour le Québec de demain.

Sommaire : Financement et gestion des transports en commun au Québec post-pandémie

Pourquoi la baisse de l’achalandage post-COVID menace-t-elle la survie de votre réseau ?

La pandémie de COVID-19 n’a pas seulement vidé temporairement les transports en commun ; elle a brisé leur modèle économique fondamental. La dépendance historique aux revenus tarifaires a transformé la crise sanitaire en une crise financière structurelle. Au plus fort de la crise, l’achalandage des réseaux a connu une chute vertigineuse, mais c’est la persistance d’un achalandage inférieur aux niveaux pré-pandémiques qui pose aujourd’hui un défi existentiel. Pour la seule région métropolitaine de Montréal, cela s’est traduit par une perte de 52% des recettes tarifaires entre 2019 et 2021, un manque à gagner colossal qui ne peut être compensé par de simples ajustements.

Cette baisse n’est pas qu’une question de chiffres, elle déclenche un cercle vicieux redoutable. Moins de revenus signifie une pression accrue pour réduire le service afin de limiter les déficits d’exploitation. Or, une réduction de la fréquence ou la suppression de lignes rend le service moins attractif, poussant encore plus d’usagers vers d’autres modes de transport, notamment la voiture individuelle. Ce phénomène érode davantage la base de revenus et justifie de nouvelles coupes. Le cas de la région de Montréal est emblématique : malgré une aide gouvernementale, l’ARTM évalue le déficit résiduel à 461 M$ pour la seule année 2024. Sans nouvelles sources de financement pérennes, les sociétés de transport sont condamnées à gérer la décroissance plutôt qu’à planifier l’avenir.

Le véritable danger n’est donc pas la baisse ponctuelle de l’achalandage, mais l’inadéquation du modèle de financement face à une nouvelle réalité où le télétravail et la flexibilité des déplacements sont devenus la norme. La survie des réseaux ne dépend plus de la simple reconquête des usagers d’hier, mais de la construction d’un nouveau pacte financier avec la collectivité, reconnaissant la valeur du service au-delà du simple ticket vendu.

Comment la captation de la plus-value foncière peut-elle payer votre nouveau tramway ?

Face à l’érosion des revenus tarifaires, la diversification des sources de financement n’est plus une option, mais une nécessité. Parmi les leviers les plus puissants et les plus justes se trouve la captation de la plus-value foncière. Le principe est simple : un nouveau projet de transport structurant (tramway, REM, SRB) augmente significativement la valeur des terrains et des propriétés avoisinantes. Il est donc légitime que les bénéficiaires de cet enrichissement, notamment les promoteurs immobiliers, contribuent au financement de l’infrastructure qui en est la source.

Ce concept n’est plus théorique au Québec. L’adoption du projet de loi 61 a marqué un tournant décisif en accordant aux organismes de transport, comme l’ARTM, une nouvelle compétence de valorisation immobilière de leurs actifs. Concrètement, cela ouvre la porte à la mise en place de redevances de transport, permettant de capter une contribution financière des acteurs privés qui profitent directement de l’amélioration de l’offre. Plusieurs études confirment l’impact positif direct des infrastructures de transport sur les valeurs immobilières, légitimant ainsi cette approche sur le plan économique.

Plutôt que de faire reposer l’essentiel de l’effort financier sur les contribuables et les usagers, ce mécanisme crée une source de revenus directement liée à la valeur économique créée par le projet. Pour un projet de tramway, par exemple, les revenus issus de la captation foncière peuvent représenter une part substantielle du coût d’investissement, allégeant d’autant la charge pour les finances publiques. Ce modèle transforme le transport collectif d’un centre de coût en un levier de développement urbain et économique, dont les bénéfices sont partagés plus équitablement.

Autobus électriques ou tramway : quel mode structurant pour une ville de 200 000 habitants ?

Le choix d’un mode de transport structurant pour une ville de taille moyenne est une décision lourde de conséquences financières et urbanistiques. L’opposition classique entre l’autobus (électrique ou SRB) et le tramway est souvent réduite à une simple comparaison des coûts d’implantation. Cependant, une analyse stratégique doit intégrer une notion plus large : le coût social global. C’est ce calcul qui révèle la véritable efficacité d’un investissement public.

L’autobus électrique, avec sa flexibilité et son coût d’infrastructure initial plus faible, apparaît souvent comme la solution de raison. Il permet de répondre aux objectifs d’électrification, comme celui du Plan pour une économie verte 2030 qui vise 55% de la flotte d’autobus urbains électrique d’ici 2030. Le tramway, quant à lui, exige un investissement initial bien plus élevé, mais il offre une capacité supérieure, un confort accru et, surtout, un effet structurant sur l’urbanisme que l’autobus ne peut égaler. Son infrastructure pérenne ancre le développement le long de son tracé et envoie un signal fort aux investisseurs.

Comparaison visuelle entre un autobus électrique moderne et une infrastructure de tramway dans un environnement urbain québécois

L’arbitrage devient plus clair lorsque l’on compare le coût social de chaque mode, incluant les externalités comme la congestion, la pollution, les accidents et l’impact sur la santé. Une analyse des coûts sociaux révèle des écarts saisissants. Pour chaque dollar dépensé, le transport par autobus génère beaucoup moins de coûts pour la société que l’automobile, le rendant bien plus « efficace » socialement.

Ce tableau illustre comment l’investissement dans le transport collectif, même s’il est plus coûteux au départ, génère des bénéfices sociaux considérables par rapport à l’automobile.

Comparaison des coûts sociaux transport collectif vs automobile
Mode de transport Coût social par dollar dépensé Ratio d’efficacité
Automobile 5,77 $ 1x (référence)
Autobus 1,21 $ 4,8x plus efficace

Pour une ville de 200 000 habitants, la décision ne doit donc pas se limiter au capital initial. Si l’objectif est une transformation urbaine profonde et la maximisation des bénéfices collectifs à long terme, le tramway est un candidat puissant. Si la priorité est la flexibilité budgétaire et une couverture plus large du territoire, un système de bus électriques à haut niveau de service (SRB) peut être plus pertinent. La clé est de fonder la décision sur une analyse complète des coûts et bénéfices sociaux, et non sur le seul coût de construction.

L’erreur de tarification complexe qui fait fuir les usagers occasionnels

Dans la quête de revenus, de nombreuses sociétés de transport ont développé des grilles tarifaires d’une complexité décourageante. Tarifs de pointe, hors pointe, laissez-passer journaliers, hebdomadaires, mensuels, tarifs zonaux… Si cette segmentation vise à optimiser les revenus auprès des usagers captifs, elle constitue une barrière à l’entrée quasi infranchissable pour l’usager occasionnel ou le touriste. Face à un automate de vente cryptique, l’automobiliste que l’on cherche à convaincre est plus susceptible de retourner à la simplicité de sa voiture que de tenter de déchiffrer la « bonne » option tarifaire. Cette friction est un coût d’opportunité majeur.

La simplification de l’expérience de paiement est donc un chantier prioritaire. L’objectif doit être de rendre l’accès au réseau aussi simple que de héler un taxi ou d’utiliser une application de VTC. Des avancées significatives ont déjà été réalisées au Québec. Par exemple, depuis 2024, les usagers de la région de Montréal peuvent recharger leur carte OPUS via l’application mobile Chrono, une innovation qui élimine le besoin de faire la file chaque mois. C’est une première étape vers une dématérialisation complète, qui permettra à terme de valider son trajet directement avec son téléphone.

Cette simplification doit aller au-delà du support de paiement. Elle doit concerner la logique tarifaire elle-même. Des modèles comme le « plafonnement tarifaire » (où l’usager paie au trajet jusqu’à atteindre le coût d’un laissez-passer journalier ou mensuel, après quoi les trajets deviennent gratuits) garantissent à l’utilisateur de toujours payer le meilleur prix, sans avoir à faire de calcul complexe en amont. C’est une manière de renverser la charge mentale de l’usager vers le système, renforçant ainsi la confiance et l’attractivité du service.

Plan d’action pour auditer votre grille tarifaire

  1. Points de friction : Listez tous les points de contact où un usager doit choisir un tarif (automate, application, site web, détaillant). Identifiez les étapes qui génèrent confusion ou abandon.
  2. Collecte des plaintes : Inventoriez les retours du service client et des réseaux sociaux concernant la tarification. Quels sont les problèmes les plus fréquents (ex: « Je ne savais pas quel billet acheter », « C’est trop compliqué ») ?
  3. Cohérence de l’offre : Confrontez votre grille tarifaire à vos objectifs stratégiques. Vise-t-elle à maximiser les revenus à court terme ou à faciliter l’accès pour de nouveaux usagers ? Les deux sont-ils compatibles ?
  4. Analyse de la concurrence (automobile) : Comparez la simplicité de l’acte d’achat d’un trajet en transport collectif par rapport au coût perçu (essence, stationnement) d’un trajet en voiture. Où se situe la plus grande simplicité ?
  5. Plan de simplification : Élaborez une feuille de route pour réduire le nombre d’options, introduire un paiement sans contact universel et tester un modèle de plafonnement tarifaire sur une ligne ou une zone pilote.

Quand redessiner le réseau de bus pour s’adapter aux nouveaux pôles de télétravail ?

La pandémie a profondément modifié la géographie du travail, déplaçant une partie de l’activité des centres-villes vers les couronnes suburbaines et les domiciles. Les réseaux de transport collectif, historiquement conçus sur un modèle pendulaire (périphérie vers centre le matin, et inversement le soir), se retrouvent en décalage avec ces nouvelles réalités. Maintenir des lignes de bus à haute fréquence vers des quartiers de bureaux désormais à moitié vides, tout en délaissant les nouveaux pôles de vie et de travail, est une allocation inefficace des ressources qui creuse les déficits.

La question n’est donc plus « faut-il redessiner le réseau ? », mais « quand et comment le faire ? ». La réponse se trouve dans les données. En 2024, l’ARTM a dévoilé les résultats d’une vaste enquête sur les nouvelles habitudes de mobilité au Québec. Ces données sont une mine d’or pour les planificateurs. Elles permettent d’identifier précisément les nouveaux corridors de déplacement, les besoins en service local au sein des quartiers résidentiels et la demande pour des liaisons transversales (de banlieue à banlieue) qui étaient auparavant marginales. Agir sans ces données, c’est naviguer à l’aveugle.

Visualisation d'un réseau de transport flexible avec services à la demande adaptés aux nouveaux pôles d'activité

La refonte ne doit pas se limiter à un simple redécoupage des lignes existantes. Elle doit intégrer de nouveaux concepts de service, comme le transport à la demande dans les zones moins denses, où des minibus peuvent être réservés via une application pour des trajets porte-à-porte ou vers un arrêt de transport structurant. Cette approche permet d’offrir une solution de mobilité là où une ligne de bus régulière ne serait pas rentable, tout en répondant à un besoin réel. L’enjeu est de taille, car les projections de l’ARTM indiquent qu’il pourrait y avoir 1 million de déplacements automobiles supplémentaires par jour d’ici 2050 dans la région métropolitaine si l’offre de transport collectif n’évolue pas. L’adaptation du réseau est donc une mesure préventive contre une congestion future catastrophique.

Pourquoi le paiement unique est-il le Saint Graal pour convaincre l’automobiliste de lâcher son volant ?

Pour l’automobiliste, la supériorité de sa voiture ne réside pas tant dans sa vitesse que dans sa simplicité déconcertante : une seule clé, un seul « paiement » (le plein d’essence) pour une liberté de mouvement quasi totale. Le transport collectif, avec ses multiples cartes, applications et grilles tarifaires, ne peut rivaliser que s’il tend vers ce même niveau d’intégration. Le paiement unique, ou plus largement l’expérience unifiée, est le véritable champ de bataille pour la conquête de nouveaux usagers.

La vision est celle d’un système où l’usager peut planifier, réserver et payer pour un trajet multimodal (bus, métro, train de banlieue, vélo-partage, autopartage) au sein d’une seule et même application, avec un seul compte. L’objectif est d’abolir les frictions entre les différents modes. Le Québec progresse sur cette voie. Comme le souligne l’ARTM, l’arrivée de nouvelles infrastructures transforme déjà la mobilité régionale. Cette intégration est la promesse d’une expérience fluide et sans couture.

C’est à la fin de 2025 que les citoyens pourront monter à bord des antennes nord et ouest du REM, un nouveau service qui viendra transformer les habitudes et créer énormément de valeur à la mobilité régionale.

– ARTM, Bilan 2024 du transport collectif métropolitain

La feuille de route pour y parvenir est déjà en partie tracée, notamment avec l’évolution de la carte OPUS et de ses services associés. Le passage au paiement dématérialisé se fera par étapes clés :

  1. Phase 1 (2024) : La possibilité de recharger sa carte OPUS via une application mobile a été une première étape cruciale pour réduire la dépendance aux points de vente physiques.
  2. Phase 2 (2025) : L’introduction progressive de la carte OPUS virtuelle sur téléphone intelligent éliminera le besoin d’une carte physique pour de nombreux usagers.
  3. Phase 3 (2025-2027) : Le déploiement de la validation des titres directement via le téléphone sur l’ensemble des réseaux de la région métropolitaine marquera une étape majeure vers une expérience sans contact.
  4. Phase 4 (Post-2027) : L’étape ultime sera de permettre l’achat de tous les titres et abonnements directement depuis son téléphone, et potentiellement de payer son trajet simplement en présentant sa carte bancaire sans contact, comme cela se fait dans d’autres grandes métropoles.

En rendant l’accès au réseau de transport collectif aussi simple et transparent que l’utilisation d’une carte de crédit, on lève l’une des principales barrières psychologiques qui freinent son adoption par les non-initiés.

Comment optimiser les trajets d’autobus régionaux pour réduire le déficit d’exploitation ?

Si les défis des grands centres urbains accaparent souvent l’attention, la viabilité du transport collectif régional est un enjeu tout aussi crucial pour l’aménagement du territoire et l’équité sociale. Les vastes distances et la faible densité de population rendent les lignes d’autobus régionales particulièrement vulnérables aux déficits d’exploitation. L’optimisation ne peut donc pas se limiter à des coupes de service, qui isoleraient davantage les communautés, mais doit passer par une meilleure adéquation entre l’offre, la demande et les leviers de financement disponibles.

L’une des clés réside dans l’utilisation stratégique des programmes d’aide gouvernementaux. Le Programme d’aide au développement du transport collectif (PADTC), par exemple, est un outil puissant pour soutenir la relance. Financé par le Fonds des réseaux de transport terrestre et le Fonds d’électrification, il a pour mission d’accroître l’utilisation du transport collectif en couvrant des dépenses admissibles. Il ne s’agit pas d’une subvention passive, mais d’un investissement visant à stimuler des projets concrets. L’enveloppe de ce programme a connu une augmentation significative de 225% en 2019-2020, signe d’une volonté politique de soutenir le secteur.

L’optimisation passe également par la technologie. L’analyse des données de géolocalisation (anonymisées) des téléphones mobiles peut permettre de comprendre les flux de déplacement réels entre les municipalités, souvent très différents des schémas traditionnels. Cette connaissance permet d’ajuster les horaires et les tracés pour maximiser le taux de remplissage. De plus, pour les zones à très faible demande, le passage à un modèle de transport à la demande, cofinancé par les municipalités desservies et le PADTC, peut offrir un service essentiel à un coût d’exploitation bien inférieur à celui d’une ligne de bus régulière circulant à vide. L’objectif est de passer d’une offre rigide à une offre agile et intelligente, qui s’adapte en temps réel aux besoins des citoyens tout en maîtrisant les coûts.

À retenir

  • La dépendance aux recettes tarifaires est le talon d’Achille du modèle économique actuel des transports collectifs québécois.
  • La diversification des revenus (captation foncière) et la simplification radicale de l’expérience usager (paiement unique, MaaS) sont les deux piliers d’une stratégie de survie et de croissance.
  • La planification doit être pilotée par les données (enquêtes de mobilité, géolocalisation) pour adapter l’offre aux nouvelles réalités du travail et des déplacements.

Mobilité servicielle (MaaS) : comment unifier tous les transports en une seule application ?

La mobilité en tant que service, ou MaaS (Mobility as a Service), représente la convergence de toutes les stratégies abordées jusqu’ici. C’est la vision ultime d’un écosystème de transport où la distinction entre les différents modes (bus, métro, train, vélo-partage, autopartage, taxi) s’efface au profit d’une expérience utilisateur totalement intégrée. Pour l’usager, le MaaS se matérialise par une seule application mobile qui lui permet de planifier, réserver et payer le trajet le plus efficient d’un point A à un point B, en combinant intelligemment les options disponibles.

Pour un administrateur de réseau, le MaaS est bien plus qu’une application : c’est un outil de gestion et d’optimisation sans précédent. En centralisant les données de déplacement, il offre une vue d’ensemble sur la demande réelle et permet d’ajuster l’offre de manière dynamique. Il facilite l’intégration de partenaires privés (taxis, VTC, services de vélos) dans l’écosystème de la mobilité publique, transformant la société de transport d’un simple opérateur en un orchestrateur de la mobilité régionale. Comme le soulignent l’ARTM et ses partenaires, l’objectif est « d’en offrir plus à la population avec les moyens existants » grâce à de nouvelles façons de faire.

Interface conceptuelle d'une application de mobilité intégrée montrant différents modes de transport disponibles

La mise en place d’un véritable MaaS est un projet complexe qui requiert une collaboration étroite entre tous les acteurs publics et privés de la mobilité, ainsi qu’une plateforme technologique robuste et ouverte. Cependant, l’objectif final justifie l’effort. C’est le seul moyen de proposer une alternative crédible et compétitive à la simplicité de la voiture individuelle. C’est également une condition pour atteindre des objectifs ambitieux, comme celui adopté par les 83 municipalités de la CMM visant à ce que 50% des déplacements se fassent en modes collectifs ou actifs d’ici 2050. Le MaaS n’est pas une fin en soi, mais le moyen le plus efficace de transformer le transport collectif en un service si pratique et si bien intégré qu’il devient le choix par défaut pour une majorité de citoyens.

Pour que cette vision devienne réalité, il est impératif de comprendre comment chaque brique de service peut s'intégrer dans un écosystème unifié.

Pour transformer ces analyses en plan d’action concret, l’étape suivante consiste à mandater une évaluation stratégique de vos sources de revenus actuelles et potentielles, et de l’adéquation de votre offre de service avec les nouvelles dynamiques de mobilité de votre territoire.

Rédigé par Valérie Gagnon, Urbaniste émérite (OUQ) et consultante en mobilité durable, spécialisée dans le transport collectif et la logistique du dernier kilomètre. Elle possède 15 ans d'expérience en planification urbaine et régionale.