Publié le 11 mars 2024

La fluidité des autoroutes québécoises ne dépend plus de la réaction aux incidents, mais de l’orchestration prédictive des flux de trafic via un système nerveux numérique.

  • Les ralentissements fantômes sont souvent causés par des micro-fractures de flux (conception des bretelles, composition du trafic) que les STI peuvent anticiper et corriger.
  • L’intégration des données issues de plus de 4500 sites de collecte permet de transformer les infrastructures (voies, feux) en outils dynamiques et adaptatifs.

Recommandation : L’enjeu pour le MTQ n’est plus d’ajouter des capteurs, mais de bâtir une architecture de données unifiée pour permettre des interventions prédictives à l’échelle du réseau.

L’image est familière pour tout ingénieur en transport au Québec : l’autoroute 15 près de Montréal ou la 40 à l’approche de Québec ralentit jusqu’à l’arrêt, sans aucun accident, chantier ou incident visible. Ce phénomène, souvent attribué à un simple surplus de véhicules, cache en réalité une dynamique bien plus complexe. La gestion du trafic a longtemps reposé sur des outils réactifs : les panneaux à messages variables (PMV) s’activent après la formation du bouchon, et les applications mobiles comme Waze, bien qu’utiles, agissent comme une somme d’intelligences individuelles et décentralisées, parfois même contre-productives à grande échelle.

Ces solutions, bien qu’indispensables, s’apparentent à des pansements sur un système circulatoire qui souffre de micro-fractures chroniques. Mais si la véritable clé n’était pas de mieux gérer la congestion une fois installée, mais de l’empêcher de se former ? Et si, au lieu de simples outils, nous concevions un véritable système nerveux numérique pour le réseau autoroutier québécois ? C’est la promesse des Systèmes de Transport Intelligents (STI) lorsqu’ils sont envisagés non pas comme une collection de technologies isolées, mais comme une architecture d’orchestration prédictive.

Cet article se destine à dépasser la vision conventionnelle des STI. Nous allons d’abord disséquer les causes profondes et souvent invisibles de la congestion. Ensuite, nous explorerons comment des technologies spécifiques, de la gestion dynamique des voies à la communication 5G, deviennent les neurones et les muscles de ce système nerveux. Enfin, nous aborderons la question fondamentale de l’architecture de données, pierre angulaire de cette transition vers une gestion proactive et intelligente de la mobilité sur les corridors autoroutiers du Québec.

Pour naviguer au cœur de cette transformation technologique, cet article est structuré pour explorer chaque facette des Systèmes de Transport Intelligents appliqués à notre réseau. Le sommaire ci-dessous vous guidera à travers les défis actuels et les solutions d’avenir.

Pourquoi ça ralentit sur l’autoroute 15 alors qu’il n’y a aucun accident ?

La congestion qui apparaît sans cause évidente n’est pas un mystère, mais le résultat d’un phénomène physique connu sous le nom d’« ondes de choc » ou de trafic fantôme. Un seul véhicule qui freine brusquement, même pour une seconde, oblige le suivant à freiner un peu plus fort, créant une réaction en chaîne qui s’amplifie vers l’arrière jusqu’à provoquer un arrêt complet à plusieurs kilomètres en amont. Ces événements sont déclenchés par ce que l’on peut appeler des micro-fractures dans le flux du trafic, qui sont invisibles mais omniprésentes.

Ces micro-fractures ont plusieurs origines. L’une d’elles est la composition même du parc automobile. Une étude de l’Association québécoise des transports (AQTR) a théoriquement démontré que la prépondérance de gros VUS (Véhicules Utilitaires Sport), avec leur dynamique de conduite et leur temps de réaction différents de ceux des berlines, peut suffire à réduire l’homogénéité du flux et à augmenter la probabilité de ces ondes de choc. L’hétérogénéité des vitesses et des comportements de conduite est un facteur déstabilisant majeur.

Ce phénomène n’est pas anecdotique. Il est au cœur du problème de congestion systémique qui s’aggrave. Selon des données récentes, on observe une augmentation de 15% de la congestion routière à Québec depuis 2019, et une grande partie de cette augmentation n’est pas liée à plus d’accidents, mais à une saturation qui rend le réseau extrêmement fragile à ces micro-perturbations. Comprendre que la congestion naît de ces instabilités, et non seulement d’incidents majeurs, est la première étape pour concevoir des contre-mesures STI efficaces. Il ne s’agit pas de gérer des accidents, mais de maintenir la stabilité du flux à tout instant.

Comment les voies réservées dynamiques peuvent-elles augmenter la capacité de 20% aux heures de pointe ?

Une voie réservée dynamique n’est pas simplement une voie supplémentaire ; c’est un outil d’arbitrage de la capacité en temps réel, un véritable aiguillage intelligent au sein du système nerveux autoroutier. Contrairement à une voie réservée statique, dont l’usage est fixe (par exemple, de 6h à 9h), une voie dynamique peut être activée, désactivée ou même inversée en fonction des données de trafic collectées sur l’ensemble du corridor. L’objectif est d’allouer la capacité là où elle est nécessaire, au moment où elle l’est.

L’efficacité de ce système repose sur la densité et la qualité des données. Le réseau du Ministère des Transports du Québec (MTQ), avec ses plus de 4500 sites de collecte de données, fournit les informations de débit et de vitesse nécessaires pour qu’un algorithme puisse déterminer le moment optimal pour activer la voie. Par exemple, sur le pont Samuel-De Champlain, la voie peut être dédiée au trafic entrant vers Montréal le matin et au trafic sortant en fin de journée, augmentant drastiquement la capacité directionnelle sans construire un mètre d’asphalte supplémentaire.

Cette approche permet une augmentation de la capacité perçue pouvant atteindre 20% ou plus pendant les périodes critiques. Cette optimisation ne vient pas de la vitesse, mais de la réduction de la variance des vitesses entre les voies, diminuant ainsi les changements de file et, par conséquent, les ondes de choc. La voie dynamique, en offrant un flux plus constant aux autobus et au covoiturage, a un effet stabilisateur sur les voies adjacentes.

Voie réservée dynamique avec signalisation lumineuse sur un pont de Montréal

Comme on peut le visualiser, cette gestion active transforme une infrastructure passive en un élément réactif du réseau. La voie devient un instrument de régulation du flux, capable de répondre non pas à un horaire, mais à la demande réelle, mesurée seconde par seconde. C’est l’un des exemples les plus concrets de la manière dont les STI permettent de maximiser l’efficience des infrastructures existantes.

Waze ou PMV : quel canal est le plus efficace pour détourner le trafic en temps réel ?

La question de l’efficacité entre les applications de navigation participatives comme Waze et les panneaux à messages variables (PMV) du MTQ est mal posée. Il ne s’agit pas d’une compétition mais d’une nécessaire symbiose. Chacun de ces canaux possède une nature et une portée différentes. Waze incarne l’intelligence décentralisée et ultra-réactive, basée sur les signalements de milliers d’usagers. Les PMV, eux, représentent la voix de l’autorité centrale, capable de diffuser un message stratégique et coordonné.

L’efficacité ne réside pas dans le choix de l’un contre l’autre, mais dans leur orchestration au sein d’une stratégie de communication unifiée. Waze est excellent pour la détection micro-locale et la redirection à court terme, mais peut provoquer des effets secondaires imprévus, comme la saturation d’artères résidentielles non conçues pour un fort débit. Les PMV, plus lents à l’activation, permettent de guider les flux de manière macroscopique et de mettre en œuvre des plans de détournement réfléchis, en tenant compte de la capacité des itinéraires alternatifs.

Le véritable enjeu pour un gestionnaire de trafic est de faire converger ces deux mondes. Les données de Waze et autres plateformes mobiles devraient alimenter en temps réel le centre de gestion de la mobilité, non pas comme une simple information, mais comme une donnée d’entrée pour les modèles prédictifs. En retour, les décisions stratégiques prises par le centre de gestion (fermeture d’une bretelle, plan de détournement majeur) doivent être poussées instantanément vers ces plateformes via des canaux comme l’API de Québec 511. Cette synchronisation permet de combiner la granularité du crowdsourcing avec la vision systémique du gestionnaire.

L’avenir est à un modèle hybride où le PMV et le téléphone intelligent ne sont que deux écrans différents affichant une même vérité opérationnelle, définie par le système nerveux central. Le PMV donne la consigne macro (« Évitez A-40 Ouest »), tandis que l’application mobile donne l’instruction micro pour l’exécuter (« Prenez la sortie 73 et suivez la 138 »).

L’erreur de conception des bretelles d’accès qui crée des bouchons monstres sur la voie rapide

Les bretelles d’accès et de sortie sont les capillaires du système autoroutier. Une conception inadéquate à ces points névralgiques est l’une des causes structurelles les plus courantes de congestion. Une bretelle trop courte, un angle d’insertion trop aigu, ou un manque de voie d’accélération force les véhicules entrants à s’insérer à une vitesse bien inférieure à celle du flux principal. Cet écart de vitesse est une micro-fracture garantie, qui génère instantanément une onde de choc sur la voie de droite, se propageant ensuite aux autres voies.

Le problème est souvent aggravé par le phénomène de « remontée de file » (spillback), où la congestion sur le réseau local en aval de la sortie s’étend sur la bretelle de sortie, jusqu’à bloquer complètement la voie de droite de l’autoroute. Ces défauts de conception, hérités d’infrastructures vieillissantes, ont un impact économique colossal. À l’échelle métropolitaine, le coût annuel de la congestion atteint 6 milliards de dollars pour le Grand Montréal, une somme en grande partie attribuable à ces points de friction récurrents.

Plutôt que d’envisager de coûteux travaux de réingénierie, les STI offrent des solutions « chirurgicales ». L’une des plus efficaces est le dosage de bretelles (ramp metering) : un feu de circulation installé en amont de la bretelle régule l’entrée des véhicules un par un ou par petites vagues, s’assurant qu’ils s’insèrent dans le flux autoroutier sans le perturber. Le cycle de ce feu n’est pas fixe ; il est ajusté en temps réel par des algorithmes qui analysent la densité et la vitesse du trafic sur l’autoroute principale, grâce à des boucles de détection ou des capteurs radar.

Étude de cas : La gestion intelligente de l’échangeur Turcot

L’échangeur Turcot, l’un des plus complexes du Québec, a été équipé d’un système de capteurs sans fil et Bluetooth couplé à des caméras HD. Ce dispositif permet au MTQ non seulement de surveiller le trafic, mais aussi de mesurer et de classifier les types de véhicules sur chaque bretelle. Ces données granulaires alimentent des algorithmes qui optimisent dynamiquement les temps des feux de dosage, réduisant ainsi la formation de files d’attente qui pourraient remonter et paralyser les artères principales de l’échangeur.

Cette approche transforme la bretelle d’un point de conflit passif à une porte d’embarquement gérée activement, préservant ainsi la fluidité et la capacité de l’axe principal.

Quand fermer les voies rapides pour l’entretien afin de minimiser l’impact économique ?

La planification de la maintenance des infrastructures autoroutières est un exercice d’équilibriste entre la nécessité technique et l’impact socio-économique. Une fermeture de voie, même partielle et de nuit, peut avoir des répercussions significatives si elle est mal planifiée. La méthode traditionnelle, basée sur des comptages historiques et des estimations de trafic, montre ses limites face à la variabilité croissante des habitudes de déplacement. Un événement imprévu en ville, une météo particulière ou un jour férié peuvent transformer une fermeture à faible impact en chaos logistique.

L’approche futuriste, permise par les STI, est celle de la maintenance prédictive et dynamique. Il ne s’agit plus de se demander « quel est le meilleur soir de la semaine pour fermer ? », mais « quelle est la fenêtre de 4 heures la plus optimale dans les 72 prochaines heures ? ». La réponse à cette question se trouve dans l’analyse en continu des données de trafic. En agrégeant les données historiques, les prévisions météorologiques, les calendriers d’événements et les données de trafic en temps réel, des modèles d’intelligence artificielle peuvent simuler l’impact d’une fermeture à différents moments.

Le centre de gestion de la mobilité devient alors un véritable tour de contrôle, capable de fournir aux équipes de maintenance des recommandations basées sur des probabilités d’impact. L’objectif est d’identifier les « creux » de trafic non pas sur un calendrier, mais dans le flux de données réel. Cette approche permet de réaliser des interventions chirurgicales, en minimisant la perturbation pour les usagers et le transport de marchandises.

Centre de gestion de la mobilité avec écrans de surveillance du trafic

Cette vision transforme la maintenance d’une contrainte subie à une opération optimisée. En comprenant les schémas de circulation à une échelle granulaire, on peut intégrer les besoins d’entretien dans le « rythme cardiaque » du réseau autoroutier, plutôt que de l’interrompre brutalement. Comme le souligne une porte-parole du MTQ face à une congestion inattendue : « Le Ministère s’attendait à un flot inhabituel […], mais rien ne laissait présager une telle manifestation ». C’est précisément ce « rien » que les modèles prédictifs visent à quantifier et à anticiper.

Pourquoi les feux adaptatifs réduisent-ils le temps de parcours de 15% comparé aux cycles fixes ?

Un système de feux de circulation à cycles fixes fonctionne comme une horloge, allouant des temps de passage prédéfinis sans tenir compte des conditions réelles. Un système de feux adaptatifs, en revanche, fonctionne comme un système nerveux. Il ne se contente pas de réagir à la présence d’un véhicule à une intersection ; il vise à créer des « vagues vertes » coordonnées sur l’ensemble d’un corridor, en ajustant en permanence la durée des feux verts et leur synchronisation (déphasage) pour correspondre au volume et à la vitesse du trafic en temps réel.

La réduction du temps de parcours de 15% ou plus n’est pas tant due à des vitesses plus élevées qu’à une diminution drastique du nombre d’arrêts et de redémarrages. Chaque arrêt est une perte d’énergie cinétique et de temps. En fluidifiant le parcours, les feux adaptatifs permettent au peloton de véhicules de progresser de manière plus constante, ce qui augmente le débit global du corridor. Le système ne cherche pas à optimiser une seule intersection, mais la performance de l’artère dans son ensemble.

Cette orchestration est rendue possible par un réseau de capteurs (boucles magnétiques, radars, caméras) qui alimentent un contrôleur central en données de trafic. Ce « cerveau » analyse les tendances et ajuste les plans de feux toutes les quelques minutes. Le gestionnaire artériel de la Ville de Québec, par exemple, illustre parfaitement cette réactivité : avec 21 500 interventions en temps réel sur les feux en 2024, soit une hausse de 35%, le système démontre sa capacité à s’ajuster dynamiquement aux fluctuations du trafic.

De plus, ces systèmes peuvent intégrer des logiques de priorité. À Montréal, le centre de contrôle intégré du MTQ, qui gère plus de 500 caméras, peut octroyer une priorité aux autobus du transport en commun à l’approche des carrefours, leur garantissant un passage rapide et améliorant ainsi la fiabilité et l’attractivité du service. Le feu de circulation n’est plus un simple régulateur, mais un arbitre intelligent des priorités de mobilité.

Pourquoi la latence de la 4G est-elle dangereuse pour les futurs véhicules autonomes ?

Alors que nous nous dirigeons vers une ère de véhicules de plus en plus connectés et autonomes, la nature de la communication sans fil devient un enjeu de sécurité critique. Comme l’anticipe le Ministère des Transports du Québec, « la mise en marché de véhicules connectés aux infrastructures ou à d’autres véhicules (V2X) ainsi que de véhicules avec un niveau d’autonomie élevé » est imminente. Pour ces applications, la latence – le délai entre l’envoi et la réception d’une information – n’est pas une question de confort, mais de survie.

Nous anticipons pour les prochaines années la mise en marché de véhicules connectés aux infrastructures ou à d’autres véhicules ainsi que de véhicules avec un niveau d’autonomie élevé.

– Ministère des Transports du Québec, Plan québécois des systèmes de transport intelligents

La technologie 4G LTE, qui équipe aujourd’hui nos téléphones, présente une latence de 50 à 100 millisecondes. C’est suffisant pour télécharger une carte ou recevoir une alerte de trafic. Cependant, pour un véhicule autonome, 100 ms de délai à 100 km/h représentent près de 3 mètres parcourus « en aveugle » avant même de pouvoir réagir à un signal. Si ce signal est un avertissement de freinage d’urgence du véhicule de devant (communication V2V – Vehicle-to-Vehicle), ces 3 mètres peuvent faire la différence entre un évitement réussi et une collision.

C’est pourquoi les futures applications de sécurité critiques dépendront de technologies à très faible latence, comme la 5G URLLC (Ultra-Reliable Low-Latency Communication) ou les communications dédiées à courte portée (DSRC). Ces technologies visent des latences de l’ordre de 1 à 10 millisecondes, réduisant la distance de réaction à quelques centimètres et permettant une coordination quasi-instantanée entre les véhicules et avec l’infrastructure (V2X).

Le tableau ci-dessous, basé sur des données de Transports Canada, met en évidence les différences fondamentales entre ces technologies de communication. Il illustre pourquoi la 4G est adaptée à l’information, mais inadéquate pour les applications de sécurité en temps réel qui formeront le socle de la conduite autonome coopérative.

Comparaison des technologies de communication véhiculaire
Technologie Latence Portée Application V2X
4G LTE 50-100 ms Plusieurs km Information non-critique
5G URLLC 1-10 ms 1-2 km Sécurité temps réel
DSRC/802.11p < 10 ms 300-1000 m Communications V2V urgentes

À retenir

  • La congestion moderne n’est pas seulement due aux incidents, mais à des « micro-fractures » systémiques dans le flux de trafic que les STI peuvent anticiper.
  • La solution n’est pas l’ajout de technologies isolées, mais leur intégration dans un « système nerveux numérique » qui orchestre les flux de manière prédictive.
  • La transition vers des véhicules autonomes et connectés rend la mise à niveau des infrastructures de communication (vers la 5G) non plus optionnelle, mais essentielle pour la sécurité.

Comment utiliser les données de trafic pour fluidifier la ville intelligente ?

La vision ultime des STI dépasse les corridors autoroutiers pour englober l’écosystème urbain dans son ensemble. La ville intelligente ne se décrète pas ; elle se construit sur la capacité à collecter, fusionner et interpréter des flux de données hétérogènes pour prendre des décisions d’optimisation en temps réel. Les données de trafic, qui révèlent que l’automobiliste montréalais moyen perd 57 heures dans les bouchons chaque année selon le rapport INRIX 2023, ne sont que la partie émergée de l’iceberg.

L’étape suivante consiste à croiser ces données de mobilité avec d’autres couches d’information : données météorologiques, horaires du transport en commun, calendrier des événements majeurs, occupation des stationnements, données de qualité de l’air, etc. Cette fusion de données permet de créer un jumeau numérique de la mobilité urbaine. Ce modèle virtuel permet de simuler l’impact de décisions avant leur mise en œuvre. Quel serait l’effet de la fermeture d’un pont sur le report modal vers le métro ? Comment un nouveau développement immobilier impactera-t-il les artères adjacentes ? Le jumeau numérique permet de passer d’une gestion réactive à une planification proactive et basée sur la preuve.

Pour l’ingénieur du MTQ ou le consultant, l’enjeu n’est plus seulement de gérer le trafic, mais de contribuer à bâtir cette architecture de données. Cela implique de s’assurer de l’interopérabilité des systèmes provinciaux avec les systèmes municipaux, de définir des standards de données communs et de mettre en place des plateformes capables de traiter ces volumes massifs d’information. La fluidité de demain ne dépendra pas de la quantité d’asphalte, mais de la qualité de l’architecture des STI qui la sous-tend.

Plan d’action : vers une architecture des STI unifiée pour le Québec

  1. Dresser le portrait complet des STI existants au Québec, en incluant ceux des partenaires municipaux et privés.
  2. Mieux connaître les besoins concrets et futurs du MTQ et de ses partenaires en matière de gestion de la mobilité.
  3. Se doter d’une architecture des STI flexible et évolutive, ajustée aux besoins spécifiques du Québec.
  4. Définir des orientations et des objectifs clairs concernant l’acquisition, le partage et l’utilisation des données STI.
  5. Assurer et imposer l’interopérabilité technique et sémantique entre les systèmes municipaux et provinciaux pour une vision intégrée.

L’objectif final est de transformer les données de trafic brutes en une intelligence stratégique qui non seulement fluidifie la circulation, mais contribue à rendre la ville plus durable, plus résiliente et plus agréable à vivre.

Pour bâtir cet avenir, il est crucial de s’appuyer sur une stratégie claire d'intégration des données à l'échelle de la ville intelligente.

Mettre en place ce système nerveux numérique pour les autoroutes du Québec est l’étape logique pour passer d’une gestion de la circulation du 20e siècle à une véritable orchestration de la mobilité du 21e. L’étape suivante consiste à intégrer ces principes dans chaque projet d’infrastructure et de technologie, en visant systématiquement l’interopérabilité et la capacité prédictive.

Rédigé par Amir Khadra, Consultant en innovation logistique et électrification des transports. Ingénieur de formation, il accompagne les entreprises dans la transition énergétique de leur flotte et l'intégration de l'IA en entrepôt.