Publié le 21 mars 2024

La fin de la congestion sur les autoroutes du Québec ne viendra plus de l’asphalte, mais des algorithmes prédictifs qui orchestrent l’infrastructure existante.

  • Les ralentissements inexpliqués (« ondes de choc ») sont prévisibles et peuvent être atténués par une gestion dynamique des flux en amont.
  • La véritable efficacité des voies réservées réside dans leur flexibilité (gestion dynamique) et non dans leur simple existence.
  • La fusion des données publiques (PMV) et communautaires (Waze) est la clé pour une information trafic à la fois fiable et personnalisée.

Recommandation : Adopter une architecture ITS unifiée pour transformer l’infrastructure routière passive en un écosystème de mobilité réactif et prédictif, capable d’anticiper les congestions avant leur formation.

Chaque jour, sur l’autoroute 15, le même phénomène se produit : le trafic ralentit, s’arrête presque, sans raison apparente. Pas d’accident, pas de chantier, juste une congestion « fantôme » qui se matérialise et se dissipe avec une frustrante imprévisibilité. Pour l’ingénieur en transport, ce scénario est un problème classique d’onde de choc, une perturbation mineure qui s’amplifie en cascade. La réponse traditionnelle a longtemps été d’élargir les voies, d’ajouter du béton, une solution coûteuse aux rendements décroissants.

Aujourd’hui, les discussions se tournent vers les Systèmes de Transport Intelligents (STI). On parle de panneaux à messages variables (PMV), d’applications mobiles et de planification des travaux. Ces outils sont utiles, mais souvent considérés comme des solutions isolées, des rustines technologiques sur une infrastructure vieillissante. Ils traitent les symptômes de la congestion, mais rarement ses causes profondes et systémiques.

Mais si la véritable révolution n’était pas dans ces technologies individuelles, mais dans leur orchestration ? Et si la clé pour fluidifier durablement nos autoroutes n’était pas d’ajouter des voies, mais de transformer l’infrastructure existante en un véritable réseau neuronal routier ? Cet article propose une vision prospective destinée aux experts du domaine. Nous explorerons comment, en passant d’une gestion réactive à une orchestration prédictive des données, les STI peuvent non seulement gérer, mais anticiper et dissoudre la congestion avant même qu’elle ne paralyse nos axes stratégiques.

Nous analyserons les mécanismes physiques de la congestion, évaluerons l’efficacité des solutions actuelles et futures, et définirons les étapes pour construire un écosystème de mobilité intelligent, réactif et adapté aux défis du Québec de demain.

Pourquoi ça ralentit sur l’autoroute 15 alors qu’il n’y a aucun accident ?

Ce phénomène, connu sous le nom d’onde de choc ou de bouchon fantôme, est la manifestation d’une instabilité inhérente aux flux de trafic denses. Il ne nécessite aucun événement externe majeur. Un seul freinage un peu trop appuyé, une manœuvre d’insertion hésitante ou une simple variation de vitesse peut initier une réaction en chaîne. Chaque conducteur suivant freine un peu plus fort que le précédent, créant une vague de décélération qui se propage vers l’amont, même si le véhicule initial a depuis longtemps repris sa vitesse. Le résultat est un corridor qui semble congestionné sans cause visible, générant une frustration immense et des coûts économiques considérables.

L’impact n’est pas anecdotique. Dans la région métropolitaine de Montréal, la congestion routière représente un coût colossal. Une étude de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) a révélé que la facture s’élevait à 6,13 milliards de dollars en 2023, une augmentation de 20% par rapport à 2022. Pour l’automobiliste moyen, cela se traduit par une perte de temps significative. En effet, selon le rapport de la firme INRIX, la congestion a fait perdre en moyenne 57 heures par automobiliste en 2023 dans la région.

Le véritable défi des STI n’est pas seulement de signaler le bouchon une fois qu’il est formé, mais de détecter ces micro-perturbations en temps réel. En analysant les données de vitesse et de densité issues de capteurs (boucles, FCD), une IA peut identifier la naissance d’une onde de choc. Elle peut alors intervenir en amont, par exemple en ajustant la cadence des feux de dosage sur les bretelles d’accès ou en affichant des vitesses recommandées sur les PMV pour « lisser » le flux et dissoudre l’onde avant qu’elle ne se solidifie en un véritable embouteillage.

Comment les voies réservées dynamiques peuvent-elles augmenter la capacité de 20% aux heures de pointe ?

La voie réservée traditionnelle, bien qu’efficace, est une solution rigide. Elle soustrait une voie à la circulation générale en permanence, même lorsque le volume de véhicules autorisés (autobus, covoiturage) est faible. L’approche dynamique, ou gestion dynamique des voies (Dynamic Lane Management), transforme cette infrastructure passive en un outil flexible et intelligent. Plutôt que d’être fixe, l’usage de la voie est modulé en fonction de l’heure, du jour ou des conditions de trafic en temps réel, grâce à une signalisation intelligente (panneaux à messages variables, feux de voie).

Cette flexibilité permet de maximiser le débit global du corridor. Aux heures de pointe, la voie peut être exclusivement dédiée aux véhicules à haute occupation (VHO), augmentant ainsi le nombre de personnes transportées par heure. En dehors de ces périodes, elle peut être rendue à la circulation générale, évitant ainsi de laisser une voie sous-utilisée. Le potentiel est énorme : selon le ministère des Transports et de la Mobilité durable, jusqu’à 20% des véhicules pourraient potentiellement utiliser une voie réservée, déplaçant ainsi un volume de passagers bien supérieur à celui d’une voie standard.

Pour visualiser comment cette technologie s’intègre à l’infrastructure existante, l’image ci-dessous illustre une configuration typique d’une voie réservée avec sa signalisation distinctive sur un axe autoroutier québécois.

Vue latérale d'une voie réservée dynamique sur autoroute québécoise avec signalisation intelligente

L’exemple québécois le plus parlant est le projet d’aménagement sur l’autoroute 20. En convertissant l’accotement de gauche en une voie réservée dynamique sur 13 km, ce projet illustre parfaitement comment on peut augmenter la capacité d’un corridor sans entreprendre un élargissement coûteux. Ouverte aux autobus, taxis et au covoiturage (2 personnes et plus) durant les périodes critiques, cette voie devient un atout stratégique modulable pour l’ensemble de l’écosystème de mobilité.

Étude de cas : Le projet de voie réservée sur l’autoroute 20 est entre Sainte-Julie et Belœil

Le projet d’aménagement de 13 km de voie réservée sur l’accotement gauche de l’autoroute 20, représentant un investissement de 172,6 M$, démontre l’approche québécoise d’utilisation dynamique des infrastructures existantes. La voie, ouverte depuis novembre 2025 aux autobus, taxis et covoitureurs (2+), illustre comment la conversion d’accotements peut augmenter la capacité sans élargissement majeur.

Waze ou PMV : quel canal est le plus efficace pour détourner le trafic en temps réel ?

La question oppose deux philosophies de la gestion de l’information trafic. D’un côté, Waze, symbole de l’intelligence décentralisée et communautaire, offre des trajets hyper-personnalisés basés sur des données en temps réel. De l’autre, les Panneaux à Messages Variables (PMV) du MTQ représentent l’approche centralisée, diffusant une information officielle et uniforme à tous les usagers. Pour un gestionnaire de réseau, aucun des deux n’est une panacée; ils sont plutôt des outils complémentaires avec des forces et des faiblesses distinctes.

L’agilité de Waze est sa plus grande force, mais aussi son talon d’Achille. En optimisant le trajet pour chaque individu (« optimisation égoïste »), l’application peut involontairement créer de la congestion sur des axes secondaires ou des rues résidentielles non conçus pour absorber un tel volume. Les PMV, bien que plus lents à réagir, permettent un détournement de trafic contrôlé et orchestré, guidant les flux vers des artères capables de les supporter. Le tableau suivant, basé sur des données publiques, synthétise cette dualité.

Comparaison entre Waze et les Panneaux à Messages Variables (PMV) du MTQ pour la gestion du trafic
Critère Waze Panneaux à Messages Variables (PMV)
Taux d’adoption Élevé (majoritaire chez les 25-45 ans) Universel (100% des usagers)
Personnalisation Trajets individualisés Messages généraux pour tous
Temps de réaction Instantané 5-10 minutes de délai
Impact sur réseau local Risque de congestion des rues résidentielles Détournement contrôlé sur axes majeurs
Crédibilité perçue Très élevée (données communautaires) Variable selon précision des informations

L’avenir ne réside pas dans le choix de l’un contre l’autre, mais dans leur fusion intelligente. Un système STI avancé doit ingérer les données brutes de Waze (et d’autres fournisseurs de données FCD) pour obtenir une vision granulaire et instantanée du réseau. Une intelligence artificielle peut ensuite analyser ces données, simuler les impacts des différents scénarios de détournement, et piloter les PMV avec des messages plus pertinents et dynamiques. L’objectif est de passer d’une information générique (« Bouchon à 5 km ») à une instruction prédictive et coordonnée (« A15 Sud ralentie, A13 fluide, empruntez la sortie 70 »).

L’erreur de conception des bretelles d’accès qui crée des bouchons monstres sur la voie rapide

Les bretelles d’accès et de sortie sont les points de friction les plus critiques d’un corridor autoroutier. Une conception suboptimale à ces endroits névralgiques est une garantie de congestion récurrente. L’erreur la plus commune est une voie d’insertion trop courte, qui force les véhicules entrants à s’insérer à une vitesse bien inférieure à celle du flux principal. Cette différence de vitesse oblige les véhicules sur la voie de droite à freiner brusquement, créant la fameuse onde de choc qui se propage instantanément sur l’ensemble des voies.

Un autre défaut de conception fréquent au Québec est la proximité entre une sortie et l’entrée suivante. Ce tissage (weaving) force des croisements de trajectoires conflictuels sur une courte distance, réduisant drastiquement la capacité et la sécurité de la section. Ces problèmes ne sont pas des fatalités; ils peuvent être atténués par une ingénierie STI ciblée. Le « ramp metering », ou feux de dosage, en est l’exemple le plus efficace. En régulant l’entrée des véhicules un par un sur la bretelle, il garantit que chaque voiture dispose de l’espace nécessaire pour s’insérer de manière fluide et sécuritaire, lissant ainsi le flux global.

L’optimisation de ces zones critiques ne s’improvise pas et requiert une approche méthodique. Il s’agit d’un processus continu d’analyse, d’intervention et de mesure, essentiel pour débloquer la pleine capacité des infrastructures existantes.

Plan d’action : Optimiser les bretelles d’accès selon l’approche québécoise

  1. Analyse des données : Identifier les bretelles systématiquement problématiques en utilisant les données des 4500 sites de collecte du MTQ pour cibler les zones de congestion récurrente.
  2. Implantation ciblée : Déployer des feux de dosage (ramp metering) aux entrées critiques pour réguler le flux véhicule par véhicule et garantir une insertion à vitesse optimale.
  3. Optimisation géométrique : Lorsque possible, allonger physiquement les voies d’insertion pour permettre aux véhicules d’atteindre une vitesse adéquate avant de rejoindre le flux principal.
  4. Détection en temps réel : Installer des capteurs FCD (Floating Car Data) ou des boucles magnétiques pour détecter en temps réel l’état de congestion au point de fusion et ajuster dynamiquement la cadence du dosage.
  5. Signalisation dynamique en amont : Utiliser le centre Québec 511 pour ajuster la signalisation (PMV) en amont de la bretelle, informant les conducteurs des délais et suggérant des itinéraires alternatifs de manière proactive.

Quand fermer les voies rapides pour l’entretien afin de minimiser l’impact économique ?

La planification des fermetures de voies pour l’entretien est un exercice d’équilibriste complexe. L’objectif est de réaliser les travaux nécessaires tout en minimisant les perturbations pour les usagers et l’économie. Une fermeture en pleine heure de pointe en semaine a un coût prohibitif en termes de temps perdu, de surconsommation de carburant et de retards de livraison. À l’inverse, travailler exclusivement de nuit peut augmenter les coûts de main-d’œuvre et poser des défis de sécurité. La stratégie optimale se situe souvent entre ces deux extrêmes et repose sur une analyse prédictive fine.

La tendance au Québec, coordonnée par des entités comme Mobilité Montréal, est de privilégier des travaux « blitz » durant les fins de semaine. Cette approche consiste à fermer complètement une section d’autoroute pendant une période continue (par exemple, du vendredi soir au lundi matin) pour concentrer les efforts et réaliser un maximum de travaux en un temps record. Bien que cela crée une congestion localisée sur les itinéraires de déviation, l’impact économique global est souvent bien inférieur à celui de fermetures partielles étalées sur plusieurs jours de semaine, où la vitesse moyenne aux heures de pointe les plus intenses est déjà de seulement 37 km/h selon l’étude INRIX.

Étude de cas : La stratégie des travaux « blitz » de Mobilité Montréal

Durant les étés 2023-2024, Transports Québec a adopté une stratégie de travaux intensifs les week-ends pour minimiser l’impact sur les heures de pointe en semaine. Ces fermetures planifiées de sections de l’A-40 ou l’A-20, bien que contraignantes, ont été systématiquement communiquées en amont, incitant les conducteurs à éviter le secteur. L’analyse post-travaux montre que cette approche, malgré la congestion temporaire sur les routes alternatives, réduit l’impact économique global comparé à des entraves prolongées en semaine.

Les STI jouent un rôle crucial en amont et pendant ces opérations. L’utilisation d’un jumeau numérique du réseau routier permet de simuler l’impact de différentes stratégies de fermeture. En modélisant les reports de trafic et en prédisant les points de congestion sur les itinéraires de déviation, les planificateurs peuvent choisir le scénario le moins pénalisant. Pendant les travaux, les STI assurent une communication en temps réel via les PMV et les applications mobiles pour guider efficacement les usagers et ajuster les plans de feux de circulation sur le réseau local afin d’absorber au mieux le trafic détourné.

Pourquoi les feux adaptatifs réduisent-ils le temps de parcours de 15% comparé aux cycles fixes ?

La signalisation à cycle fixe est une technologie du passé, opérant sur une horloge prédéfinie sans égard pour les conditions de circulation réelles. Un feu peut rester rouge pour une rue transversale vide tandis qu’une file de véhicules s’allonge sur l’artère principale. Les feux de circulation adaptatifs, en revanche, sont les « yeux et le cerveau » du réseau artériel. Équipés de capteurs (boucles magnétiques, caméras, radars), ils analysent les volumes de trafic en temps réel sur chaque approche de l’intersection.

Leur intelligence réside dans leur capacité à ajuster dynamiquement la durée des feux verts pour répondre à la demande. Plutôt que de suivre un plan rigide, un algorithme centralisé (ou local) orchestre les cycles pour maximiser la fluidité du corridor le plus achalandé, réduire les files d’attente et minimiser le nombre d’arrêts. Ce principe s’applique aussi aux mesures préférentielles pour bus (MPB). Un bus approchant de l’intersection peut communiquer sa présence au contrôleur de feux, qui va alors prolonger le feu vert ou écourter le feu rouge pour lui donner la priorité. Selon la STM, ces mesures permettent des gains de temps pour la clientèle d’environ 5 à 20%.

La réduction de 15% du temps de parcours est une moyenne souvent observée, car l’effet est cumulatif. En fluidifiant une intersection, on réduit la probabilité de formation d’une file d’attente qui pourrait bloquer l’intersection précédente (spillback). Un réseau de feux adaptatifs coordonnés crée une « onde verte« , permettant à des pelotons de véhicules de traverser plusieurs intersections successives avec un minimum d’arrêts. Pour les artères qui alimentent ou qui sont alimentées par les autoroutes, cette technologie est fondamentale pour éviter que la congestion urbaine ne se propage sur le réseau supérieur, et vice-versa.

Pourquoi la latence de la 4G est-elle dangereuse pour les futurs véhicules autonomes ?

La latence, soit le délai entre l’envoi et la réception d’un signal, est un paramètre critique pour la sécurité des véhicules autonomes (VA) connectés. Dans un environnement V2X (Vehicle-to-Everything), où les voitures communiquent entre elles et avec l’infrastructure, chaque milliseconde compte. La latence typique d’un réseau 4G/LTE se situe entre 30 et 100 millisecondes. Cela peut sembler instantané pour un humain, mais pour un véhicule se déplaçant à 100 km/h (soit ~28 m/s), un délai de 100 ms signifie qu’il parcourt près de 3 mètres avant même de recevoir l’information critique qu’un véhicule en amont vient d’effectuer un freinage d’urgence.

Ce délai est tout simplement inacceptable pour des applications de sécurité active comme l’évitement de collision ou le freinage coopératif. La promesse de la 5G réside dans sa capacité à réduire cette latence à moins de 5 millisecondes (latence ultra-faible et haute fiabilité, ou uRLLC). À cette vitesse, la communication devient quasi-instantanée, permettant à un convoi de véhicules de réagir comme un seul organisme. Si le véhicule de tête freine, l’information est transmise à tous les autres véhicules du peloton qui initient leur propre freinage simultanément, sans attendre de « voir » les feux de stop du véhicule qui les précède. C’est le fondement de la conduite coopérative et automatisée.

Le Québec dispose déjà d’une infrastructure de collecte massive avec plus de 4500 sites qui recueillent des données de débit, mais la transition vers des réseaux de communication à faible latence est l’étape suivante indispensable pour préparer nos autoroutes à l’ère des VA. Comme le définit l’Office québécois de la langue française, les STI ne se limitent pas à la route :

Les systèmes de transport intelligents couvrent surtout le réseau modal de transport routier, tout en incluant les services et les processus d’interface avec les autres modes de transport.

– Office québécois de la langue française, Définition officielle des STI

Cette interconnexion modale, essentielle pour les VA, dépendra entièrement de la performance du réseau de communication sous-jacent. La 4G a permis l’émergence des applications de navigation en temps réel; la 5G permettra l’émergence d’un écosystème de mobilité coopératif et sécuritaire.

À retenir

  • La congestion autoroutière est avant tout un phénomène de système (ondes de choc) causé par des perturbations de flux, et non uniquement par des incidents isolés.
  • La solution réside moins dans l’ajout d’infrastructures physiques que dans l’orchestration dynamique et prédictive des flux de trafic grâce aux données STI.
  • L’interopérabilité des systèmes, via une architecture ITS commune, est la condition sine qua non pour transformer les données en actions de gestion de trafic efficaces et coordonnées à l’échelle du réseau.

Comment utiliser les données de trafic pour fluidifier la ville intelligente ?

La fluidification des corridors autoroutiers n’est qu’une pièce du puzzle. La véritable intelligence d’un système de transport se mesure à sa capacité d’intégration. Les données collectées sur l’autoroute (vitesse, densité, temps de parcours) doivent dialoguer avec les données du réseau urbain (état des feux, occupation des stationnements, position des autobus). C’est cette vision holistique qui définit le passage d’une simple gestion de trafic à la construction d’une ville intelligente.

Le principal obstacle à cette vision a longtemps été le manque de normes communes, chaque technologie et chaque municipalité développant ses propres systèmes en silo. Pour surmonter cet enjeu, Transport Canada a développé l’Architecture ITS pour le Canada, alignée sur son équivalent américain ARC-IT. Cette architecture fournit un langage et un cadre communs pour que les différents systèmes puissent communiquer et collaborer. Pour un planificateur québécois, cela signifie pouvoir concevoir un système où les informations d’un ralentissement sur l’A-40 peuvent automatiquement ajuster les plans de feux sur le boulevard Décarie et informer le système de gestion de la flotte de la STM.

L’Architecture canadienne des STI et son application au Québec

Transport Canada a développé l’Architecture ITS pour le Canada, mise à jour en 2020 (Version 3.0) pour s’aligner avec l’architecture américaine ARC-IT. Cette architecture permet aux planificateurs québécois de développer des systèmes intégrés utilisant un langage commun, facilitant l’interopérabilité entre les technologies V2V (véhicule à véhicule) et V2I (véhicule à infrastructure) essentielles pour la gestion intelligente du trafic urbain.

En pratique, l’utilisation de ces données unifiées permet des stratégies d’optimisation à grande échelle. On peut anticiper un afflux de véhicules quittant l’autoroute en raison d’un incident et préparer le réseau local à l’absorber. On peut corréler les données de trafic avec les horaires d’événements majeurs (match au Centre Bell, festival) pour mettre en place des plans de gestion proactifs. Le réseau routier n’est plus une collection d’axes indépendants, mais un écosystème de mobilité intégré, capable de s’autoréguler pour maintenir un état de fluidité optimal.

Pour mettre cette vision en œuvre, il est impératif de s’appuyer sur un cadre stratégique clair, tel que celui défini par les principes de l'architecture ITS nationale.

Pour concrétiser cette vision, la prochaine étape pour tout projet d’infrastructure au Québec est d’évaluer son intégration au sein de l’Architecture ITS du Canada et de contribuer activement à l’enrichissement de cet écosystème de données partagées.

Rédigé par Amir Khadra, Consultant en innovation logistique et électrification des transports. Ingénieur de formation, il accompagne les entreprises dans la transition énergétique de leur flotte et l'intégration de l'IA en entrepôt.